L'Allemagne et l'Italie sont en passe de rater leurs objectifs ; L'Espagne, pour sa part, dépasse ses objectifs de 7 points de pourcentage
Douze pays de l'Union européenne (UE) ne parviendront pas à atteindre leurs objectifs climatiques nationaux dans le cadre du règlement sur le partage de l'effort (ERR), selon une nouvelle étude publiée par la Fédération européenne des transports et de l'environnement (T&E).
L'UE explique que le règlement sur la répartition de l'effort adopté en 2018 établit des objectifs nationaux de réduction des émissions provenant du transport routier, du chauffage des bâtiments, de l'agriculture, des petites installations industrielles et de la gestion des déchets.
Ces secteurs, qui jusqu'à présent n'étaient pas inclus dans le système d'échange de quotas d'émission de l'UE, génèrent actuellement environ 60 % des émissions de gaz à effet de serre du bloc.
Pour atteindre l'objectif de réduction des émissions mondiales de l'UE pour 2030, la Commission a proposé de réduire les émissions dans le cadre du RRE d'au moins 40 % par rapport aux niveaux de 2005, ce qui représente une augmentation de onze points de pourcentage par rapport à l'objectif précédent d'une réduction des émissions de 29 %.
T&E dénonce qu'au moins sept autres pays risquent de ne pas atteindre leurs objectifs. Par ailleurs, l'Allemagne et l'Italie sont les deux pays qui affichent les pires résultats.
La France n’atteindra son objectif que de très peu, mais tout revers dans sa politique, ou même un hiver très froid entraînant une hausse de la consommation d’énergie, signifie qu’elle pourrait tomber dans la zone rouge.
Toutefois, l’organisation prévient qu’il est encore temps de rectifier les politiques gouvernementales pour atteindre les objectifs de 2030.
Selon l’étude, l’Allemagne et l’Italie ne parviendront pas à atteindre leurs objectifs climatiques avec une différence substantielle (respectivement 10 et 7,7 points de pourcentage).
En conséquence, ils pourraient consommer tous les crédits carbone disponibles laissés aux autres pays. L'Allemagne à elle seule aura besoin de 70 % des crédits disponibles. D’autres pays qui ne respectent pas les règles pourraient se retrouver sans permis d’achat et faire face à des poursuites judiciaires.
L'ALLEMAGNE DEVRAIT PAYER JUSQU'À 16,2 MILLIARDS D'EUROS
L’étude note également que si les allocations étaient négociées à 129 €, le prix du carbone projeté par Bloomberg pour les secteurs ETS en 2030, l’Allemagne devrait payer jusqu’à 16,2 milliards d’euros aux pays qui dépassent leurs objectifs pour acheter des crédits.
Cela au moment où le pays fait face à une crise budgétaire et où son gouvernement devra combler un trou de 40 milliards d’euros dans son budget d’ici 2025.
De son côté, l'Italie est actuellement en passe de rater son objectif de 7,7 points de pourcentage, ce qui équivaut à une facture de 15,5 milliards d'euros. Mais les deux pays peuvent encore atteindre leurs objectifs en mettant en œuvre de nouvelles mesures visant à accroître l’adoption des véhicules électriques ou à isoler les bâtiments, entre autres, indique l’étude.
De même, l’étude indique que les pays qui n’atteignent pas leurs objectifs peuvent acheter des crédits carbone à ceux qui les atteignent.
Le prix des crédits est décidé bilatéralement entre les pays. Mais T&E prévient que sans action immédiate, il y aura une pénurie de crédit, car de nombreux pays n'atteindront pas leurs objectifs. Cela pourrait conduire à une guerre d’enchères pour les crédits en 2030, ce qui pourrait faire grimper leurs prix.
L'ESPAGNE PARMI LES PAYS QUI ACCUMULERONT LE PLUS DE SURPLUS DE CARBONE
D’autre part, T&E souligne que les pays qui accumuleront le plus d’excédents sont l’Espagne, la Grèce et la Pologne, comme le montre également l’analyse.
L’Espagne devrait dépasser son objectif pour 2030 de 7 points de pourcentage. Le gouvernement espagnol pourrait recevoir 10 milliards de dollars de pays qui ne sont pas sur la bonne voie.
Cinq pays, dont la France et les Pays-Bas, ont soumis des plans qui sont à peine suffisants pour atteindre leur objectif, mais tout affaiblissement de leurs politiques signifie que ces pays pourraient tomber dans la zone rouge et devoir payer des crédits carbone, prévient T&E.
En vertu du règlement sur la répartition de l’effort, les États membres doivent atteindre les objectifs climatiques dans cinq secteurs clés : le transport routier, le bâtiment, la petite industrie, les déchets et l’agriculture.
Les objectifs ont été conçus en fonction du PIB d'un pays, les pays les plus riches devant atteindre des objectifs de réduction des émissions plus élevés.
L’objectif global de l’UE est de réduire la pollution de 40 % d’ici 2030 (par rapport aux niveaux de 2005) dans les cinq secteurs. Les pays doivent présenter des Plans Nationaux Énergie et Climat (Pniec) décrivant comment ils entendent atteindre l’objectif avant le 30 juin.
T&E a analysé le projet de Pniecs et les projections les plus récentes pour calculer les réductions d'émissions possibles des 27 pays de l'UE.
En ajoutant les plans nationaux soumis par les pays, les émissions dans les secteurs des ERR ne devraient diminuer que de 35,5 % en 2030 (par rapport à 2005). Cela représente 4,5 points de pourcentage de moins que l'objectif de l'UE de 40 %.